Qui étaient les parents de Nicolas Edouard Lorillon ?

Extraits de l'acte de mariage de Nicolas Edouard Lorillon et Pauline Delacroix le 26/10/1840 à Canteleu (76)
Temps de lecture : 9 minutes

Qui étaient les parents de Nicolas Edouard Lorillon (sosa 84) ? Pendant des années je suis restée bloquée sur cette question. C’était à l’époque où les archives n’étaient pas numérisées. Et toutes mes recherches avaient échoué. Nous étions dans les années 90 (au siècle dernier pour les jeunes).

Ma branche Lorillon commence (ou se termine, c’est selon) par Louisa Henriette Lorillon (sosa 21), grand-mère paternelle de ma grand-mère paternelle et petite-fille de Nicolas Edouard Lorillon. Elle était la fille d’Elie Nicolas Lorillon (sosa 42) dont j’ai déjà parlé dans ce billet.

Ma première « rencontre » avec les parents de Nicolas Edouard Lorillon a lieu lors du mariage de celui-ci avec Pauline Delacroix (sosa 85), le 26 octobre 1840 à Canteleu (76). Nicolas Edouard était alors employé des douanes et habitait Canteleu. Dans son acte de mariage, j’apprends qu’il est né à Tréforest (maintenant réuni à Mesnil-Mauger) le 28 janvier 1812. Il est indiqué que ses parents sont François Lorillon (sosa 168) et Marie Marguerite Payen (sosa 169) « dont le domicile est inconnu et qui n’ont pu manifester leur volonté« . Le lien entre Nicolas Edouard et ses parents semble donc totalement rompu. Et le juge de paix du canton de Forges-les-Eaux, auquel appartient Tréforest, n’a pas davantage pu les retrouver. Un acte de notoriété a en effet été produit pour constater que leur domicile était bien inconnu.

Extraits de l’acte de mariage de Nicolas Edouard Lorillon et Pauline Delacroix le 26/10/1840 à Canteleu (76) – AD 76 – Canteleu – NMD 1840 – 3E 00482 – vue 74/103

Les témoins de Nicolas Edouard sont des amis, aucune personne de sa famille n’est présente.

Son acte de naissance confirme le nom de ses parents.

Nous sommes en 1812 et François Lorillon est dit âgé de 49 ans, être journalier et domicilié à Tréforest. Il serait donc né vers 1773. Aucun âge n’est indiqué pour Marie Marguerite Payen, elle est juste désignée comme l’épouse de François.

J’en suis restée là pendant des années, sans rien trouver sur ce couple.

Les autres enfants du couple

En 2018, grâce à Filae, je trouve plusieurs autres enfants au couple :

  • Jean Sébastien Lorillon né le 19 janvier 1810 à Tréforest comme mon ancêtre Nicolas Edouard. Comme quoi, je n’avais encore une fois pas bien cherché… avais-je jamais consulté les tables décennales de Tréforest ? Manifestement non ! Dans cet acte de naissance, François est dit âgé de 46 ans,
  • Marie Marguerite née le 17 mai 1813 à Beaubec-la-Rosière et décédée le 26 juin suivant, son père a 48 ans
  • Stanislas né, toujours à Beaubec-la-Rosière, le 7 juillet 1814, également décédé 17 jours plus tard, son père a 49 ans.

Il ressort donc de ces nouvelles informations que François Lorillon serait né vers 1763. La date de 1773 déduite de l’acte de naissance de Nicolas Edouard était probablement fausse.

Par ailleurs dans tous les actes trouvés, François Lorillon est dit journalier.

Je trouve ensuite que Jean Sébastien s’est marié à Bouelles (76) le 8 décembre 1838. D’après l’acte, ses parents étaient domiciliés à Gaillefontaine (76). Mais là aussi un acte de notoriété est produit attestant que Jean Sébastien « ne peut produire l’acte de décès de ses père et mère ni celles de ses ayeux, qu’étant absent depuis dix huit ans, il en a perdu la trace et ne sait ce qu’ils sont devenus« . Cela signifie que dès l’âge de 10 ans, il ne vivait plus avec ses parents.

En résumé, arrivée en 2018, je ne sais toujours pas où et de qui sont nés François Lorillon et Marie Marguerite Payen, ni quand ils sont décédés. Les seules informations que j’ai sont :

  • François Lorillon est né vers 1763,
  • François Lorillon et Marguerite Payen sont décédés après 1814,
  • François Lorillon et Marguerite Payen ont habité au moins entre 1807 et 1814 dans le Pays de Bray, successivement à Tréforest et Beaubec-la-Rosière,
  • Jean Sébastien et Nicolas Edouard Lorillon leurs fils n’ont plus de lien avec leurs parents lorsqu’ils se marient, et ce probablement depuis leur enfance.
Famille connue de François Lorillon et Marie Marguerite Payen fin 2018

Et la lumière fut !

Je recherchais régulièrement dans Généanet et Filae si je pouvais trouver plus d’information sur le couple. Sans succès.

Jusqu’au 28 décembre 2019 !

En fait, je n’ai pas réellement trouvé d’information nouvelle ce jour-là, j’ai juste poussé un peu plus loin l’investigation. Je n’avais toujours rien trouvé de plus sur le couple. Mais en cherchant un François Lorillon né vers 1763, je suis, pour la nième fois, tombée sur un certain Cyr François Lorillon, vigneron, puis marchand de vin, né en 1763 à Saint-Agnan dans l’Yonne.

Je ne m’étais pas arrêtée sur lui car il s’était marié avec une certaine Marie Anne Boucheron le 22 pluviôse an II et avait eu 5 enfants avec elle entre 1795 et 1805. Et surtout il était dans l’Yonne.

Jusqu’alors je n’avais jamais réalisé que personne ne semblait connaître la date de décès de Cyr François Lorillon.

Même si la profession et les prénoms n’étaient pas exactement les mêmes, cela valait peut-être le coup de creuser un peu. D’autant que, Lorillon n’est pas un nom normand, je soupçonnais donc que François venait d’ailleurs.

A ce stade je sentais déjà que cette piste était prometteuse. J’ai compris que j’avais sans doute trouvé mon François lorsque j’ai consulté les actes de mariage de ses enfants.

L’aîné, Cyr François comme Papa, s’est marié le 27 avril 1819 à Villeblevin. Son acte de mariage dit qu’il est le fils « de Cir François Lorillon absent du pays depuis le vingt quatre novembre mille huit cent cinq dont la demeure est ignorée« . Même chose dans les actes de mariage de sa sœur Marie Jeanne Elisabeth le 30 avril 1823 toujours à Villeblevin et de son frère Victor Auguste le 5 juillet 1826 à Saint-Agnan.

A partir de là j’étais sûre qu’il s’agissait de mon ancêtre. Mais je n’avais pas de preuve concrète si ce n’est que c’était possible. A un détail près : n’ayant pas divorcé de Marie Anne Boucheron, comment pouvait-t-il avoir épousé Marie Marguerite Payen ?

Toujours est-il que, dans l’Yonne, on ne sait rien de Cyr François Lorillon après 1805. En Normandie on ne sait rien de François Lorillon avant 1810.

Si j’avais raison, j’avais élucidé un mystère vieux de plus de 200 ans !

La confirmation

Le lendemain de cette découverte, je trouve un autre enfant au couple Lorillon x Payen.

Il s’agit de Pierre François, fils aîné. Celui-ci s’est marié à Pierrecourt le 24 juillet 1838. Dans l’acte de mariage il est dit « fils naturel de feu François Lorillon et de feu Marguerite Payen« . C’est le seul acte de mariage des enfants du couple Lorillon x Payen qui donne « autant » d’information.

J’apprends donc que François et Marie Marguerite n’étaient pas mariés et étaient déjà décédés en 1838.

Mais surtout, il est indiqué dans son acte de naissance le 10 décembre 1807 à Pierrecourt : « est comparu François Lorillon âgé de quarante quatre ans, profession de journalier, de la commune de Villeblevin département de l’ionne, et demeurant en cette commune depuis un mois« .

Cet acte est la clé qui me confirme que mon François Lorillon est bien le Cyr François Lorillon de l’Yonne !

Mort de François Lorillon

Au cours de l’année 2020 je progresse dans mes recherches. Et grâce aux indexations de Filae je trouve enfin l’acte de décès de François Lorillon le 17 avril 1818. Je ne l’aurais jamais trouvé sans ces indexations. En effet François est décédé à Gaillon dans l’Eure, et plus précisément à la Maison Centrale !

L’acte dit qu’il est « âgé de 56 ans né à Villeblevin département de l’Yonne poissonnier demeurant à Beaubec la Ville fils de feu Philippe et de feu Claudine Millet« . Tout colle à part la commune de naissance, mais Saint-Agnan et Villeblevin sont très proches.

Je me mets alors à divaguer et à imaginer que la raison pour laquelle François était en prison était peut-être celle pour laquelle il avait quitté l’Yonne et sa famille le 26 novembre 1805. Il me fallait consulter les registres d’écrou de la prison de Gaillon.

Quelques années plus tard (en 2023 je crois), je me suis rendue aux archives de l’Eure à Evreux.

La consultation du registre d’écrou m’apprend que François Lorillon est arrivé à la prison de Gaillon le 6 novembre 1816. Et ce, à la suite de sa condamnation à six ans d’emprisonnement le 30 mai 1816 par la Cour Royale de Rouen, pour vol de bestiaux.

Il n’a donc survécu qu’un an et demi à son incarcération.

C’est le château de Gaillon, ancienne résidence d’été des archevêques de Rouen, qui tenait alors lieu de prison. Il avait été acheté par l’Etat en 1812 pour y installer une maison centrale. Les maisons centrales ont été créées sous Napoléon pour accueillir les condamnés à de longues peines. Il est prévu d’y faire travailler les détenus, ceci étant sensé rendre ces prisons peu coûteuses.

Celle de Gaillon, après de nombreux travaux, destructions et constructions, est inaugurée en novembre 1816. Cyr François faisait donc partie des premiers détenus. Ceci explique pourquoi, condamné fin mai, il n’a été incarcéré à Gaillon qu’en novembre. Les premiers détenus venaient de la prison de Rouen, c’est donc sans doute là-bas que Cyr François avait passé les premiers mois de sa peine.

Le premier atelier de travail installé dans la prison est un atelier de tissage aménagé dans une cave du château. Cyr François y a très probablement travaillé.

Au moment de sa condamnation, Cyr François est dit poissonnier. En quoi a consisté son crime ? Aurait-il volé des poissons ? Le vol de bestiaux et le vol de poissons en étang sont mentionnés dans le même article (388) du code pénal de 1810. Aurait-on qualifié son crime de « vol de bestiaux » dans ce cas ? A vrai dire j’en doute.

A-t-il été pu être condamné à Rouen pour un crime commis 11 ans plus tôt dans l’Yonne ? Ou cette condamnation n’a rien à voir ? Il me faudra aller voir aux archives de Seine-Maritime si je peux trouver ce jugement. Pour l’instant mystère. Et là est la deuxième énigme… que s’est-il passé en 1805 pour que Cyr François Lorillon quitte subitement tout ?

Si quelqu’un a une idée de la façon dont je pourrais poursuivre cette recherche dans l’Yonne pour trouver la raison de ce départ, n’hésitez pas à m’en faire part.

C’est assez vertigineux de se dire que ses enfants icaunais n’ont jamais su ce qu’était devenu leur père. J’aurais voulu pouvoir leur dire tout ce que j’avais appris et qu’ils ignoraient.

Famille de Cyr François Lorillon (cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Et Marie Marguerite Payen dans tout ça ?

Je me penche ensuite sur Marie Marguerite Payen. Malheureusement ce nom n’est pas rare, d’où mes difficultés jusqu’alors pour avancer. Mais je me doute maintenant que si François est originaire de l’Yonne, Marie Marguerite est plus probablement du Pays de Bray. Je me concentre donc sur toutes les Marie Marguerite Payen (ou seulement Marie ou Marguerite) dans les communes de ce territoire situé à l’est de la Seine-Maritime.

Je trouve ainsi qu’avant François Lorillon, elle s’était mariée le 1er floréal an V à Saint-Léger-au-Bois (76) avec Pierre Nicolas Durié. Elle avait eu trois enfants avec lui :

  • Antoine né le 29 pluviôse an VI,
  • Vincent Lambert né le 26 fructidor an VII,
  • Marie Marguerite née le 24 pluviôse an IX.

Tous sont nés à Richemont (76) où est également décédé leur père en 1802.

J’apprends grâce à l’acte de mariage que Marie Marguerite Payen est la fille de Jacques (sosa 338) et de feu Marie Rose Dumont (sosa 339).

Le 1er juin 1826, Vincent Lambert Durié, se marie au Havre. Marie Marguerite demeure alors à Beaubec-la-Rosière. Elle a donné son consentement par un acte établi chez Me Beaufils notaire à Forges-les-Eaux.

C’est dans l’acte de mariage de Marie Marguerite Durié, qui se marie à Louviers (27) le 9 juillet 1845 que j’apprends que sa mère est décédée à Paris le 27 mars 1831.

Par chance, cet acte a été reconstitué. Pourquoi ? Il est indiqué sur la page de garde de l’acte, que cela a été fait à la demande du greffe de Louviers en 1873. En lisant l’acte on comprend que c’est en fait une copie conforme qui avait été envoyée à Louviers à l’occasion du mariage de sa fille. Ce qui est troublant c’est que cet acte est enregistré à Paris le 25 mars 1873, 3 jours avant le décès de sa fille survenu à Cherbourg le 28 mars 1873. Il n’y a pourtant sans doute aucun lien entre la reconstitution de l’acte parisien et le décès de cette dernière.

Je trouve dans cet acte qu’en 1831, elle habitait à Saumont-la-Poterie (76) où elle était couturière, et qu’elle est décédée 4 parvis Notre-Dame. Après vérification sur un plan de Paris, je pense qu’il s’agit en fait tout simplement de l’Hôtel-Dieu. Mais que faisait-elle à Paris ? Encore un mystère.

Je découvre aussi, qu’après le décès de Cyr François Lorillon, elle a épousé Joseph Florimond Normand le 30 janvier 1823 à Beaubec-la-Rosière. C’est avec cet acte de mariage que je découvre qu’elle est née à Saint-Léger-aux-Bois le 4 août 1777.

Famille de Marie Marguerite Payen (cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Conclusion

J’étais partie de Nicolas Edouard Lorillon qui a son mariage ne semblait pas avoir de famille, ne semblait rien connaître de ses parents, si ce n’est leurs noms, pour découvrir qu’il avait finalement eu 12 frères et sœurs ! Il n’a pu en connaître que quelques-uns (7 au maximum), mais jusqu’à quel point ? Jusqu’à quel âge ? Avait-il une idée de l’histoire de son père ?

Et qu’est-ce qui a poussé Cyr François Lorillon a quitter l’Yonne et toute sa famille ?

Trop de questions restent ouvertes. Je vais continuer à traquer les Lorillon pour essayer d’en savoir plus. Tout porte à croire que ce billet n’est pas le dernier sur cette famille.

3 Replies to “Qui étaient les parents de Nicolas Edouard Lorillon ?”

  1. 2
    Laëtitia

    Et j’espère bien, un jour, trouver plus d’informations sur cette famille. La raison de la « disparition » de Cyr François de l’Yonne, mais aussi ce qu’il est advenu des enfants pendant leur enfance et leur jeunesse restent des énigmes. Et le fait que Jean Sébastien Lorillon ait été absent pendant 18 ans du « pays » m’intrigue, ainsi que le parcours de mon ancêtre Nicolas Edouard avant son arrivée à Canteleu. Bref encore quelques années avant un nouveau billet levant ces mystères ?

  2. 3
    Romain - Mes Ancêtres et moi

    Une enquête qui nous fait voyager et que j’ai adoré suivre ! Merci de nous faire partager ces aventures de François et Marie Marguerite.

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