Tout commence par un mail de ma tante :
Coucou ma Laëti,
En rangeant des cartes postales j’en ai découvert une dizaine au nom de Marie CONSTANTIN 18 rue Mazurier à Mont saint Aignan….et au nom de Mr et Mme CONSTANTIN à Foucart par Fauville, Seine inférieure
Ces cartes devaient être chez ma grand mère.
Ces noms te disent-ils quelque chose ????
La grand-mère dont parle ma tante est Solange Levasseur la mère de ma grand-mère paternelle, épouse de Raymond Aubé mon arrière-grand-père.
Quel lien cette famille Constantin peut-elle avoir avec mes arrière-grand-parents ? Constantin n’est pas un nom que j’ai rencontré dans mes recherches jusqu’alors.
Ma curiosité éveillée me voilà immédiatement partie à consulter les recensements de Foucart… ce village non plus n’est jamais ressorti dans mes recherches. Il est au cœur de la Seine-Maritime, département d’origine de la très grande majorité des ascendants du couple Aubé/Levasseur. Il compte aujourd’hui environ 350 habitants, et en comptait presqu’autant au début du 20e siècle.
J’explore donc les recensements de 1901 à 1926, et c’est assez rapidement que j’y trouve un couple Constantin (et un seul) qui a habité à Foucart au moins de 1906 à 1921 et qui n’y habitait pas encore en 1901 et n’y habitait plus en 1926.
Bien entendu, je demande à ma tante de m’envoyer des scans de toutes ces cartes postales.
En attendant, je jette un petit coup d’œil à Généanet et à l’Etat Civil sur le site des Archives Départementales de Seine-Maritime et je me retrouve rapidement avec un mini arbre généalogique de cette famille Constantin.
Après avoir reconstitué cet arbre, je commence à penser que ces Constantin ne sont pas liés à ma famille, ou tout au moins qu’il n’existe pas de lien familial. En effet aucun des patronymes, ni des villages où ont vécu les membres de cette famille ne sont en communs avec ceux de mes ancêtres.
Arrivent alors les cartes postales qui sont en fait au nombre de 18. Je vais donc les analyser une à une dans l’ordre dans lequel ma tante me les a envoyées.
Carte n° 1
Transcription
Le 16 Février 1913
Chère Soeur
Je fait réponse a ta
carte sa va toutjour
bien pour le momten
Je pense que vous alés
bien tout li ne fait pas
chaux a Caudebec je voi
rien a te dire le bonjour tout
le monde je t’embrasse bien
fort insi que Victor
é Suzane é Henri
ta soeur qui pense a toit
taime
Louise Constantin
Mademoiselle M Constantin
18 rue Masurier
Mont St aignan pres Rouen Seine Inferieure
Analyse
Puisque j’ai déjà lu une partie des autres cartes postales, je peux dire qu’il s’agit d’une carte envoyée par Louise Constantin à Marie Constantin. Toutes deux sont les filles du couple Constantin de Foucart : Félicité Elise Louise et Marie Félicité Pascaline. Elles ont alors respectivement 34 et 38 ans.
Force est de constater que l’ortograf de Louise n’est pas parfaite…
Cette carte nous apprend qu’en février 1913, Louise habite à Caudebec-en-Caux et Marie à Mont-Saint-Aignan au 18 rue Mazurier.
Louise embrasse également Victor, Suzanne et Henri. Je pense immédiatement que Victor doit-être leur frère (Joseph Victor Firmin). Mais qui sont Suzanne et Henri ? Peut-être la femme et le fils de Victor ? Je replonge dans Geneanet et les AD 76, et… oui bingo ! Victor s’est bien marié avec une Suzanne (en fait Mathilde Suzanne) Duval en 1912 à Foucart. Et ils reconnaissent ce jour là un fils, Henri Joseph Paul qui est né Duval en 1899 à Hautot-l’Auvray où demeurait sa mère. Je ne suis pas sûre du tout qu’il soit le fils de Victor (et même assez sûre du contraire). Au moment de leur mariage Victor et Suzanne habitaient déjà à Mont-Saint-Aignan et étaient tous deux domestiques.
Les témoins du mariage de Victor et Suzanne sont :
- Théodule Quemin, 56 ans, rentier, demeurant à Sotteville-lès-Rouen, oncle de Victor,
- Jules Constantin, 25 ans, domestique, demeurant à Foucart, frère de Victor,
- Charles Dambry, 32 ans, employé de commerce, demeurant à Saint-Aubin-Jouxte-Boulleng, beau-frère de Suzanne,
- Marie Defrêne, 69 ans, rentière, demeurant au 18 rue Mazurier à Mont-Saint-Aignan, amie de Suzanne.
Tiens tiens… 18 rue Mazurier…
A ce stade, je formule l’hypothèse que Victor et Suzanne étaient domestiques de la famille Defrêne et habitaient également au 18 rue Mazurier.
A cette adresse aujourd’hui se trouve un belle maison bourgeoise.
Elle peut largement héberger un couple de domestique.
D’ailleurs en 1921, une famille Plantrou y habite (Eugène, Eugénie et leur fille Marie) avec 3 domestiques.
Malheureusement je ne peux pas vérifier cette hypothèse car le recensement de 1911 n’est pas sur le site des AD 76 et dans le recensement de 1906, il n’existe pas de 18 rue Mazurier, la numérotation s’arrête à 16 ? Est-ce à dire que la maison n’existait pas encore en 1906 ? C’est fort probable.
Mais qui sont exactement Marie Defrêne et sa famille ?
Une recherche sur Geneanet de Defrene à Mont-Saint-Aignan me donne seulement deux résultats :
Le premier résultat m’amène sur la liste électorale de 1913 pour Mont-Saint-Aignan. Et là, youpi, Emile Defrêne habite alors 18 rue Mazurier.
Il est né à Rouen le 10 décembre 1859. Enfin c’est ce qui est écrit sur la liste électorale, mais dans l’état civil de Rouen à cette date (et même cette année-là) point d’Emile Defrêne, ni aucun autre Defrêne d’ailleurs. Dans la table décennale des naissances de 1852 à 1869 on trouve deux Defre(s)ne (Louise Hyacinthe née le 27 janvier 1954 et Emilie Albertine née le 26 septembre 1860)… dans la table décennale de l’Hôtel-Dieu il n’y a aucun Defre(s)ne. Mais alors d’où vient Emile ?
C’est alors que j’ai l’idée de chercher dans Gallica le 18 rue Mazurier à Mont-Saint-Aignan. Et je tombe très vite sur un avis de décès de notre Emile dans le journal « Le Petit Havre ». Du coup je consulte le « Journal de Rouen » à la même date et trouve un autre avis de décès plus intéressant, car l’avis passé dans Le Petit Havre l’a semble-t’il été par des relations professionnelles, alors que celui passé à Rouen l’a été par sa famille.
Cela ne me dit pas où et quand il est né, mais me donne de nouvelles pistes de recherche.
Emile est donc décédé le 7 octobre 1915 et était négociant au Havre. Je vous passe les détails de la recherche, mais Emile était négociant en café au Havre où il avait a priori fondé sa société en 1878. Arrivé à l’âge de la retraite je suppose qu’il a vendu sa société à Messieurs Sard et Horréard (Henri) et s’est retiré à Mont-Saint-Aignan. Il se prénommait en réalité Victor Emile et était né à Rouen le 24 juillet 1848. Soit pas du tout le 10 décembre 1859 comme l’indique la liste électorale de 1913. Que dois-je en penser ? Qu’il ne s’agit pas du même Emile ? Cela m’étonnerait, mais c’est à garder à l’esprit. Sa femme s’appelait Marie Rose Evrard. Ils s’étaient mariés en 1898 à Paris 10e. S’agit-il de la Marie Defrêne mentionnée dans l’acte de mariage de Victor ? En tout cas l’âge correspond.
Toujours est-il que j’ai pu reconstituer l’arbre suivant pour la famille Defrêne.
A priori les seuls Defrêne ayant habité au 18 rue Mazurier sont Victor Emile et sa femme Marie Rose Evrard.
A ce stade, j’ai pu ajouter Suzanne Duval et Henri Constantin à l’arbre Constantin :
Dans le prochain billet j’analyserai la carte n° 2.
Sources :
[…] Une autre personne est évoquée dans la carte : Charles. Toujours parce que ces cartes parlent principalement de la famille; je suppose qu’il s’agit de Charles Dambry son beau-frère, celui qui était témoin à son mariage (voir premier billet de cette série). […]
Bonjour,
« Malheureusement je ne peux pas vérifier cette hypothèse car le recensement de 1911 n’est pas sur le site des AD 76 et dans le recensement de 1906, il n’existe pas de 18 rue Mazurier, la numérotation s’arrête à 16 ? Est-ce à dire que la maison n’existait pas encore en 1906 ? C’est fort probable. »
Probable mais ça mériterait un petit tour par le cadastre pour le confirmer parce que j’ai fait la généalogie de ma maison, et notamment les recensements, et pendant plusieurs recensements successifs le numéro à varié, en particulier dans ces années là, avant de se fixer à son numéro actuel.
Bonjour Patrice,
Je suis quand même sûre que la maison a été construite dans ces années-là. Le quartier est tout neuf et a commencé à être construit fin XIXe début XXe. Auparavant il n’y existait que quelques fermes et des champs. Dans les recensements précédents la rue Mazurier n’existe pas. Ma plus grosse inconnue est l’année exacte de construction de la maison et la confirmation qu’elle a été construite par Emile Defrêne. A vérifier en effet par la consultation du cadastre, mais je suis loin des archives de Seine-Maritime… à vérifier lors d’un séjour à Rouen. A moins qu’un gentil membre de ma famille ait envie d’aller y faire un petit tour pour moi 😉